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L’inductance en UHF et au-delà.

On distinguera les inductances destinées à accorder les circuits LC et les inductances dites "de choc" ou de "blocage" destinées à s'opposer au passage des courants RF. Pour ces deux types d'application, on ne demandera pas les mêmes caractéristiques.

Pour les réseaux LC et circuits accordés, on demandera à ces inductances un minimum de pertes.

Aux inductances "de choc", on demandera une impédance maximale voire souvent un certain facteur d'amortissement.

Les trois paramètres principaux

La valeur de l'inductance, en nH en général. Pour les circuits accordés et les réseaux LC, les inductances feront au maximum quelques centaines de nH en VHF ( 30 à 200MHz ) et quelques dizaines de nH en UHF ( 200 à 1000 MHz)

La résistances "série" équivalente rs . Pour les inductances destinées aux réseaux LC et aux circuits accordés, on exigera une résistance rs la plus faible possible. A cet effet, on définiera Qo = ZL /rs ( ou ZL est l'impédance de l'inductance à la fréquence considérée).

La résistance série augmente avec la fréquence , et donc est très supérieure à celle qu'on pourrait mesurer en continu !

La capacité parasite parallèle Cp, en parallèle sur l'inductance. Cette capacité va modifier l'impédance totale. Très souvent le fabricant ne donne pas la valeur de cette capacité parasite , mais donne la fréquence de résonance du circuit LC parallèle, fréquence à laquelle l'impédance du composant est maximale.

Il faudra inclure ces éléments parasites lors d'une modélisation du composant.....

Une autre catégorie de selfs, les selfs "imprimées" se modélisent de façon plus complexe...

Modélisation d'une inductance en fonction des données fabricant:

Le fabricant donne souvent la fréquence de résonance parallèle (impédance maximale) et le Qo en fonction de la fréquence .

Exemple : Une self de 10 nH est donnée pour une impédance maximale à 3 Ghz, et un Qo de 200 à 1 Ghz.

L'impédance maximale correspond à la fréquence de résonance du circuit LC constitué de l'inductance et de sa capacité parasite. En appliquant la formule de Thomson, on trouve ne capacité parasite Cp = 0,28 pF.

A 1Ghz, l'impédance de 10 nH, c'est Z = j62 Ω. Sa résistance série est donc

r = Z/Q = 62/200 = 0,3 Ω.

Oui, mais voilà, la résistance dépend de la fréquence....

Donc on pourra faire une modélisation avec r = 0,3 Ω seulement autour du GHz. Du fait de l'effet de peau, la résistance ohmique d'un conducteur est proportionnelle à la racine carrée de la fréquence. Si on double la fréquence, cette résistance sera multipliée par 1,4 et sera donc environ 0,4 Ω.....A condition que le diamètre du bobinage soit inférieur à lambda/40 , donc à 150/40 = 3,7 mm, sinon une autre résistance s'ajoutera à la résistance ohmique, la résistance de rayonnement.....

Pour les circuits accordés à faibles pertes, ou de puissance:

il faudra utiliser des inductances de dimensions suffisantes, en fil émaillé, voire argenté, de diamètre suffisant , pour avoir un Qo suffisant.

Sans exagérer le diamètre, quand même. N'oublions pas que des bobines de grand diamètre rayonnent en UHF, ce qui va poser des problèmes de couplages à d'autres circuits de la carte . Dans ce cas, il sera parfois nécessaire de placer l'inductance dans un boîtier blindé.

Jusqu'à une dizaine de watts, des diamètres de bobines de 4 mm à 6 mm , en fil de diamètre 6 ou 8 dixièmes de mm, sont un bon compromis...Nous donnons plus loin un tableau en exemple de valeurs d’inductances en fil émaillé.

Lorsqu'on n'a pas des problèmes de puissance, on pourra utiliser des inductances plus petites, par exemple des diamètres de 2 mm ou 3 mm , mais avec un fil de diamètres suffisant pour conserver un bon Qo.

En UHF, les inductances ont des valeurs suffisamment faibles pour être réalisées avec une seule couche, ce qui minimise la capacité parasite parallèle.

Les inductances CMS :

On utilise des inductances CMS pour plusieurs raisons : encombrement, moins de rayonnement... Si on craint des couplages parasites sur une carte, on aura tout intérêt à utiliser des petits formats . Mais attention, le Qo ne sera pas extraordinaire !…

Il faudra en effet connaître les défauts des inductances de petites dimensions :

Ces inductances CMS ( 1 ou 2 mm) sont réalisées en fil très fin, et donc ont des résistances telles qu'elles sont pratiquement impropres à constituer des circuits accordés avec un Q raisonnable. Par exemple, une inductance en boitier 1206 pourra présenter une résistance de plusieurs Ω en UHF.

( Attention, la résistance mesurée à l'ohm-mètre en continu est plus faible, puisque la résistance d'un conducteur augmente avec la fréquence , à cause de l'effet de peau !)

Ainsi, à 160 MHz, une petite inductance aura un Qo de 20 . Si on l'utilise dans un circuit accordé de Qc = 10, on perdra la moitié de l'énergie dans ce circuit ( voir chapitre 2)

On choisira des inductances CMS monocouche pour éviter d'avoir trop de capacité parasite ( les premières spires doivent être éloignées des dernières) . On évitera les inductances à ferrites, car les ferrites induisent des pertes, et sont peu stables.....La qualité des ferrites se dégrade très vite au-delà de la centaine de MHz. Encore utilisables en VHF, on les évitera en UHF, en tout cas pour les circuits accordés.

Enfin, on trouve des inductances dont le fil conducteur n'est pas trop fin , de l'ordre de 50/100, qui ont encore des Qo tout à fait honorable, supérieur à 100. Vous trouverez plus loin une description de ce genre de selfs , que l'on peut soi même fabriquer.

Pour les simulations, on calculera la résistance série r , connaissant le Qo donné par le fabricant, à la fréquence envisagée ..( voir le chapitre 2)

Sinon, on pourra mesurer cette résistance série ( voir plus loin)

Mesure d’une inductance

Les inductances-mètres classiques sont rarement capables de mesurer correctement les inductances de l’ordre de quelques nH.

Voici un exemple utilisant la méthode du réjecteur : Nous confectionnons un circuit résonnant série en soudant une capacité CMS de 10 pF ( précise) en série avec l’inductance à mesurer , et nous plaçons ce circuit série en parallèle sur une ligne de transmission reliant un générateur à un analyseur de spectre . ( FIG 71)

La figure 72 montre l'écran de l'analyseur tracking, avec une réjection de 34 dB

Connaissant la capacité et la fréquence de résonance, nous en déduisons l’inductance :

L = 25,4 / F2 . C ( F en GHz, C en pF)

D’où L = 74 ,8 nH

Enlevons environ 1 nH apporté par le boitier CMS de la capacité CMS , et nous obtenons une valeur l’inductance de 74 nH.

filtre

Cette mesure va même nous apprendre plus : La réjection est rej = 34 dB.

courbe

Nous pouvons calculer la résistance série à cette fréquence, ce qui nous donnera une idée de la qualité de ce circuit résonant série .

rs = 25 / ( (10 exp ( rej / 20) ) -1)

D’où rs = 25 / ( (10 exp ( 34/20) ) -1) = 0,5 Ω.

En réalité, le condensateur est du type « High Q », avec une résistance série de 0,1 ohm. Donc la résistance série de la self est de 0,4 Ω.

Quel Qo peut-on espérer obtenir avec cette inductance utilisée dans un circuit accordé à cette fréquence ?

A 184 MHz, l’impédance de 74 nH est L. 2 pi F = 86 Ω.

Associée à un condensateur parfait, le Qo du circuit serait, si ZL est l’impédance de l’inductance, Qo = ZL /rs = 86 /0,4 = 215

Valeur de rs en fonction de la réjection sur une ligne 50 Ω :
Réjection : 6dB 10dB 16dB 20dB 30dB 40dB
rs (Ω) 25 11,5 4,7 2,7 0,8 0,25

Confectionner des inductances.

A l’aide de fil émaillé, nous pouvons confectionner des inductances d’assez bonne qualité comme celle mesurée ci-dessus.

Nous utilisons du fil émaillé de diamètre 8/10.

Nous enroulons ce fil à spires "quasi jointives" sur un mandrin de diamètre donné (par exemple un forêt). Les spires sont écartées juste pour ne pas avoir contact, car cela rajouterait de la capacité, et la soudure pourrait fondre l'émail et provoquer un contact.

Vu de face, cela donne :

FIG 74

Le tableau suivant donne la valeur de l’inductance en nH, en fonction du diamètre sur lequel le fil a été enroulé, et du nombre de spires quasi jointives.

Le Qo de ces inductances est supérieur 100 à la fréquence 400 MHz.

Diamètre intérieur D : 2 spires 3 spires 4 spires 5 spires 6 spires
5mm 26nH 48nH 72nH 100nH 125nH
4mm 18nH 35nH 53nH 72nH 90nH
2,6mm 10nH 18nH

Inductance de "blocage"

On a parfois besoin d'utiliser une inductance pour empêcher la RF de circuler dans un conducteur, tout en présentant une résistance nulle en continu. C'est le cas par exemple en CEM pour filtrer des pistes d'alimentation.

Si je veux "bloquer" la RF en UHF avec une inductance CMS, je pourrais innocemment me dire que plus il y a de µH, mieux ce sera...Et je choisirai une inductance de 10µH....Hélas, une inductance CMS de 10µH se comportera non plus comme une inductance, mais comme une capacité (sa capacité parasite !) qui laissera passer les UHF que je voulais bloquer...Sans oublier que son fil très fin ne supportera pas de forts courants.

Si je veux bloquer la RF dans une bande relativement étroite, par exemple autour de 500 MHz, je pourrai utiliser une inductance CMS de 470 nH monocouche et sans ferrite: Avec sa capacité parasite, elle constituera un "circuit bouchon" ( résonance parallèle) et présentera une impédance de plusieurs milliers d'Ω.

Mais en général, on cherche a bloquer la RF sur une large bande. On utilisera à cet effet des "selfs de choc" ou "de blocage", composées d'un conducteur entouré de ferrite. Leur impédance R + jX, de l'ordre de quelques dizaines à quelques centaines d'Ω, augmente avec la fréquence. Aux fréquences UHF, c'est le terme R qui devient prépondérant, ce qui évite de provoquer des résonances parasites. De plus, elles sont pratiquement exemptes de capacité parallèle parasite.

Les gros formats comme la "VK200" sont utilisables de quelques dizaines à quelques centaines de MHz. Les formats CMS s'utilisent de quelques centaines de MHz jusqu'à plus du GHZ .

Pour les petites selfs a ferrites, on vérifiera qu'on ne dépasse pas le courant continu qui provoque la saturation de la ferrite...

Inductances réglables ;

Pour accorder finement des circuits en bande étroite, on peut imaginer un noyau sous forme d'une vis en ferrite qui permettra de faire varier la valeur de l'inductance.

Mais les ferrites classiques présentent de plus en plus de pertes au fur et à mesure qu'on monte en fréquence. Encore utilisables en VHF, jusqu'à 200 MHz environ , à faible puissance et si on accepte une baisse du Qo......Mais au delà, en UHF, un noyau ferrite apporte beaucoup de pertes .

Il est cependant possible en UHF de réaliser un petit ajustage de la self à l'aide d'un noyau métallique, en aluminium, par exemple....

Et au delà du GHz ?

Si nous avons affaire à des cartes de petites dimensions, comme celles des téléphones portables, par exemple, une solution consistera à réduire toutes les dimensions de façon à avoir des selfs de l'ordre de quelques millimètres. Mais on a vu que plus on rapetisse la self, plus le Qo baisse. La réalisation de filtres à forte sélectivité va devenir difficile, et on s'orientera souvent pour ces filtres vers des filtres "céramique" ou à ondes de surface....On réservera les micro-selfs pour les applications ne nécessitant pas un Q élevé, ni, bien sur, trop de puissance.....

Si nous disposons par contre de suffisamment de place, on pourra conserver des Q importants en passant aux composants à constantes réparties en imprimant des lignes ( qui deviennent petites en hyperfréquence) , avec un isolant meilleur que l’époxy , comme nous l'avons vu pour les condensateurs. La théorie des lignes et l'abaque de Smith permettront d'en calculer les dimensions..

Pour réduire l'encombrement et le rayonnement, nous aurons intérêt à avoir des inductances plus petites encore. Par exemple, avec du fil de cuivre 55/100 (émaillé 6/10), selfs bobinées sur un forêt de 2mm, spires toujours "quasi jointives". Nous aurons les valeurs suivantes :

Diamètre intérieur 2 mm:
2 spires 3 spires 4 spires
8,5 nH 14 nH 20 nH

Avec des valeurs aussi basses, la longueur des "pattes" rajoute de l'inductance, presque 1 nH par mm. Les valeurs ci-dessus sont mesurées au ras de la bobine. Il faudra tenir compte de l'inductance supplémentaire rajoutée par le routage.

Le Qo de ces selfs est encore acceptable ( supérieur à 100 ) du fait que le diamètre du fil n'est pas encore trop réduit, si on le compare aux selfs CMS courantes du commerce.

En hyperfréquence.

Les selfs imprimées :

A partir de quelques GHz, pour des raisons de place et de fabrication, il sera plus commode de supprimer les inductances en 3D et de passer aux circuits à constantes réparties, ou aux inductances imprimées .

Notamment pour les circuits hybrides en hyperfréquences, une telle inductance sera directement imprimée lors du processus de fabrication. Et elle sera disposée à une certaine distance du plan de masse.

self imprimée

Cependant, une inductance imprimée n'aura jamais un Qo aussi élevé qu'une inductance en 3 dimensions de dimensions équivalentes. Le Qo serait plus élevé pour les inductances imprimées éloignées du plan de masse, mais les contraintes de place incitent à rapprocher le plan de masse du plan de l'inductance, et la modélisation reste complexe, puisqu'il apparait l'effet de "ligne" , et une capacité parasite variable.

La distance au plan de masse joue beaucoup sur la valeur de l'inductance. Lorsque le plan de masse est suffisamment proche, on peut considérer que le composant est en fait une ligne enroulée sur elle-même pour des raisons de place.

Les micro selfs 3D ;

Cependant, dans le cas de miniaturisation, il est encore possible d'utiliser des inductances 3D parfois jusqu'en bande X...

La question sera alors de savoir comment conserver un Qo suffisant.
On sait qu'il y a deux causes principales de diminution du Qo :

  1. la résistance ohmique augmente, du fait de l'effet de peau.
    Le courant circule sur une épaisseur inversement proportionnelle à la fréquence.
  2. la résistance de rayonnement.
    Cette résistance augmente comme la puissance 4 du rapport D/lambda. (si la self n'est pas blindée.) Les calculs montrent que cette résistance commence à jouer si le diamètre dépasse 1/40 de lambda. En UHF, ce sera de l'ordre du cm, mais en bande X, c'est de l'ordre du mm !

Par exemple, on pourra utiliser à 2 Ghz une inductance de paramètres suivants :
diamètre du fil émaillé : d = 4/10 mm
diamètre intérieur D int = 12/10 mm, donc Diamètre extérieur 20/10 mm,
Avec un nombre de spires égal à 3, quasi jointives, on obtiendra une inductance de l'ordre de 8 nH et un Qo de l'ordre de 100.

inductance BX

Pour évaluer les dimensions possibles d'une inductance en fonction de la fréquence, on utilisera le principe d'homothétie: Par exemple, Si on multiplie la fréquence par 4 , on divisera par 4 TOUTES les dimensions ( diamètre, longueur, diamètre du fil.....) et on trouvera une inductance de valeur 4 fois inférieure...*.

Avec l'inductance ci-dessus, cela donne à 8 Ghz une inductance de paramètres suivants :
diamètre du fil : d = 1/10 mm
diamètre intérieur D int = 3/10 mm (donc Diamètre extérieur 5/10 mm),
Avec un nombre de spires égal à 3, on obtiendra donc une inductance de l'ordre de 8:4 = 2 nH, mais le Qo sera réduit de moitié, donc environ à 50.

Des inductances de si petites dimensions sont peu pratiques à manipuler. On utilisera du fil argenté, car l'étamage devient délicat, en vérifiant qu'il n'y a pas contact entre les spires.

Les besoins en inductances localisées sont importants avec les circuits hybrides hyperfréquence. Cependant, industriellement, il est bien plus commode d'utiliser des micro lignes ou des inductances imprimées sur un substrat adéquat, monocouche ou multicouche. Mais les inductances ainsi créées ont nettement plus de capacité parasite et un Qo plus faible.

* Dans le principe d'homothétie, seul le Qo n'est pas conservé, puisque l'épaisseur de peau est inversement proportionnelle à la racine carrée de la fréquence. Si on divise par 4 les dimensions d'une inductance, à la fréquence quadruple on aura la même impédance, mais un Qo divisé par 2.

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